Créée en 2021, la compagnie L’eau Salée a su se frayer un chemin dans le monde du théâtre calédonien avec un style qui se démarque par son engagement. Sa fondatrice, Marion Farcy, puise son inspiration dans le courant britannique In-Yer-Face – ce « théâtre coup-de-poing » qui secoue, dérange, provoque, pour mieux faire réfléchir. Ce samedi 29 novembre, la compagnie présentera au Château Hagen Girls & Boys, un seul-en-scène d’une rare intensité sur les ravages provoqués par les pervers narcissiques. Un spectacle soutenu par la province Sud, à la fois puissant, dérangeant et nécessaire.
En moins de cinq ans, L’eau Salée a monté une dizaine de spectacles, oscillant entre créations amateurs et projets professionnels. Une effervescence portée par Marion Farcy, qui a grandi en Nouvelle-Calédonie et découvert très tôt sa passion pour la scène. « J’ai débuté à Pacifique et Compagnie, puis j’ai poursuivi en option théâtre au lycée Lapérouse. En arrivant en métropole pour mes études, j’ai suivi deux ans de formation dans une école de théâtre à Lyon », raconte-t-elle.
Si les concours des grandes écoles ne lui ouvrent pas leurs portes, Marion ne se décourage pas : avec des camarades, elle fonde la troupe Le Bourdon, spécialisée dans le théâtre anglais contemporain. « Ce théâtre cru, frontal, qui traite de sujets tabous, c’est ce qui nous animait », confie-t-elle. Sarah Kane et les auteurs britanniques des années 80 deviennent ses influences majeures.

Marion Farcy : « Ne pas marcher sur les plates-bandes des autres. J’ai voulu amener autre chose : faire découvrir le théâtre anglais contemporain. »
Revenir au pays pour transmettre… et créer
Son retour en Nouvelle-Calédonie bouleverse son parcours mais pas sa vocation. « J’avais envie de revenir, d’enseigner. »
En 2021, elle crée la Nouvelle école artistique au Faubourg, où elle accueille des jeunes en ateliers hebdomadaires ou en stages. Une opportunité de représentation avortée au Théâtre de l’Île finit de déclencher une évidence : il est temps de fonder une compagnie.
Avec L’eau Salée, Marion devient metteuse en scène, un rôle qui lui permet d’embrasser la création sous un autre angle. « Je me vois aujourd’hui comme une cheffe de projets », sourit-elle. Un rôle qui implique aussi de défendre ses dossiers auprès des institutions. Un exercice qu’elle mène avec succès : « Depuis 2022, la province Sud m’a soutenue dans chaque projet professionnel. Je mesure la chance d’être accompagnée avec autant de constance. »

Proposer un théâtre différent : engagé, percutant et nécessaire
Les spectacles que Marion choisit ont un point commun : ils bousculent. Sa ligne artistique ? « Ne pas marcher sur les plates-bandes des autres. J’ai voulu amener autre chose : faire découvrir le théâtre anglais contemporain. »
Elle revendique un théâtre engagé, militant, sans fard. « Si c’est creux, ça ne m’intéresse pas. Il faut qu’il y ait un propos fort, et un humour grinçant. Je ne sais pas faire de la comédie pure. J’aime les textes qui me donnent de la liberté pour la mise en scène. »
Depuis 2022, elle enchaîne les créations à un rythme quasi boulimique : Contradictions, Mon prof est un troll, L’Inattendu, Silver Bullet, Love in Portofino, Girls & Boys, Le gros monstre qui aimait trop lire, Les funérailles d’hiver etc… Autant de projets soutenus par la province Sud, qui a joué un rôle déterminant dans l’essor de la compagnie.

Un engagement féministe assumé : “Ligne de liberté”
Au-delà de scène, Marion porte aussi un projet citoyen et profondément féministe. Elle est lauréate 2026 de l’appel à projets « Objectif égalité » de la province Sud avec Ligne de liberté, des ateliers de lecture et d’écriture autour de l’égalité de genre.
« L’idée est de sensibiliser les femmes, les jeunes filles et la société civile aux enjeux de l’égalité, à travers la lecture, l’écriture et la création artistique », explique-t-elle. Un projet à la croisée du culturel, de l’éducatif et du citoyen, pensé comme un véritable levier d’émancipation.
Save the date — “Girls & Boys” : un seul-en-scène coup-de-poing
➡️ 18 h au Château Hagen
Dans le cadre des Samedis au Château Hagen, sur le thème « Orange en scène », la compagnie L’eau Salée présentera Girls & Boys, pièce de l’auteur britannique Dennis Kelly.
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Un seul-en-scène glaçant sur l’emprise psychologique et les mécanismes destructeurs des pervers narcissiques.
« C’est un spectacle construit comme un film », confie Marion Farcy. « Ça commence comme une conférence TEDx, puis l’interprète (l’incroyable Sam Kagy) dévoile peu à peu sa vie. C’est brillant, très bien structuré, et émotionnellement redoutable. »
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Entre théâtre et catharsis, Girls & Boys plonge au cœur des violences invisibles, en résonance directe avec la lutte contre les violences faites aux femmes. Une expérience qui ne laisse personne indemne.
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