
Quand la résilience se tresse au quotidien. C’est l’histoire de Corinne et Sylvain qui après des années de travail acharné, ouvrent enfin le premier et prestigieux salon de coiffure Jean Louis David à Nouméa… juste avant que tout s’effondre dans les violences du 13 mai 2024.
Mais c’était sans compter sur leur ténacité, et un coup de pouce tombé à pic : le dispositif Sud Pro, qui leur a permis de relancer leur communication et de croire, encore, en leur projet.
Leur histoire, c’est celle de beaucoup d’entrepreneurs calédoniens : du courage, des hauts, des bas… et l’envie de continuer, coûte que coûte, avec le soutien de la province Sud. Portrait.
De l’Hexagone au Caillou : l’art de tresser un avenir commun
Depuis toute petite, Corinne se passionne pour les chevelures à sublimer. Très tôt, dès la classe de troisième, elle persuade ses parents de l’inscrire dans une école de coiffure privée au Mans. « Je ne voulais pas perdre de temps », relate-t-elle. Déterminée et exigeante, elle complète sa formation de quatre ans par des concours le week-end, afin de gagner en technique et en confiance.
Rapidement repérée, elle débute sa carrière à Saint-Malo, avant de mettre le cap sur Paris avec un objectif clair : coiffer sur les plateaux de télévision. Ce rêve la mène à une rencontre des plus déterminantes : Franck Provost et son fils Fabien. « Ce fut le coup de cœur ! », se souvient-elle. Elle intègre alors leurs prestigieux salons, d’abord sur l’avenue Franklin-Roosevelt, où elle découvre l’univers de la coiffure studio… mais aussi Sylvain, coiffeur passionné, qui deviendra son futur mari.
Elle gravit les échelons et devient manager dans le salon de Fabien Provost, rue des Mathurins, à la tête d’une équipe de 15 personnes. En 2012, un nouveau chapitre s’ouvre avec la naissance de leur premier enfant : « Devenus parents, nous rêvions de continuer à vivre notre passion dans un endroit moins agité, au soleil, avec une douceur de vivre. Une belle opportunité s’est présentée à Nouméa, où je suis devenue manager chez Franck Provost », partage-t-elle.
Une passion, deux cœurs et mille défis
Trois ans plus tard, le couple décide de s’installer définitivement à Nouméa et rachète Saint Germain Coiffure, un petit salon indépendant. Fidèles à leurs racines, Corinne et Sylvain voient encore plus loin : « J’ai toujours dit à M. Provost que ce n’était qu’un au revoir. Mon but était de revenir dans le groupe, en tant que franchisée », confie Corinne.
Après douze ans de recherche, à la veille d’un départ en vacances en 2022, leur projet prend forme. Ils décident de lancer leur salon Jean Louis David, une franchise du groupe Provalliance, racheté par Franck Provost en 2007. « La marque est aujourd’hui présente dans 1 000 salons dans le monde, avec un style urbain, rock et audacieux que nous voulions implanter ici, en Nouvelle-Calédonie. »
Mai 2024 : le rêve suspendu
Les travaux démarrent en avril 2024. Mais à peine lancés, c’est l’hécatombe. Le 13 mai, le projet s’arrête net : dossiers bancaires bloqués, matériel immobilisé, assurances impossibles à obtenir, personnel incertain… Les retards s’enchaînent et le chantier prend six mois de retard. Les finances, elles, s’effondrent. « Le rêve est devenu un cauchemar. », se désole Corinne.
Pour tenir, le couple se concentre sur leur salon historique, Saint Germain, et poursuit malgré tout les travaux. À force d’abnégation et de courage, le 1e avril 2025, le salon Jean Louis David ouvre enfin ses portes. Mais la reprise est un choc : « C’est la douche froide… Malgré tous nos efforts, le prévisionnel est faussé, toutes nos économies y sont passées, et la clientèle manque…Dans ce contexte instable, avec les nombreux départs et les arrivées rares, nous n’avons plus de chiffre d’affaires, avec une baisse de -30 % pour Saint Germain Coiffure… Comme beaucoup de Calédoniens, nous sommes en grande difficulté financière, mais nous survivons. » confie-t-elle.
Sud Pro : « le coup de pouce qui tombait à pic ! »
En mai 2025, le dispositif Sud Pro est une bouffée d’air. « Grâce à cette aide, nous avons pu financer une première campagne de publicité, et avons souhaité faire appel à des patentés pour terminer notre plafond et nous équiper, notamment avec la pose de climatiseurs. Mais malheureusement, le dispositif a été vite saturé. Nous aurions eu besoin de plus de temps pour solliciter des patentés et mettre en place ces projets. »
Ce temps, Corinne et Sylvain pourront en bénéficier dès le 31 juillet ! En effet, Sud Pro revient avec des objectifs recentrés sur les besoins concrets et les remontées de terrain des patentés et TPE.
Une version revisitée du dispositif qui permettra aux patentés de disposer du temps nécessaire pour faire appels aux entreprises et réaliser des devis.
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Une résilience à toute épreuve
Aujourd’hui, la situation est critique. « On peut parler de précarité », confie Corinne. Soutenus temporairement par leur banque, qui a gelé certains crédits, ils avancent jour après jour. « Ce projet, on l’a fait avec le cœur. Nous y croyons encore. » Ce qui les tient : leur passion, la solidarité de leur clientèle, et une foi inébranlable en des jours meilleurs : « Chaque épreuve nous rend plus forts. Il faut continuer à croire en la vie, à rester solidaires, et prier pour une Calédonie apaisée », assurent-ils.