Comment la Province a réussi sa transition numérique



C’était un objectif clairement affiché par Sonia Backès, présidente de la province Sud dès 2019 : faire de la province Sud une collectivité numérique, notamment grâce à la dématérialisation. Soit la volonté de faire de la province Sud une collectivité numérique. Quatre ans plus tard, le contrat est rempli. Plus de 80 % des services proposés sont accessibles sur Internet et de nombreux projets sont en cours. Mais au-delà des chiffres, cette évolution a été imaginée afin d’améliorer les conditions d’accès aux services de tous les administrés, en recréant même, dans certains cas, de la proximité.  Cela vous semble paradoxal ? Explication.


La consommation d’Internet n’a cessé de croître en NouvelleCalédonie depuis 1994 et l’arrivée des premiers fournisseurs d’accès. Plus récemment, le déploiement de la fibre à partir de  2016, pour accompagner l’explosion des volumes de données échangés et la multiplication des objets connectés dans les foyers, a bouleversé les habitudes en multipliant par 5 le débit de données. Forcément, pour une collectivité regroupant plus de 200 000 habitants, il a fallu adapter ses services… et surtout les mettre en ligne. Ceux-ci sont passés de 17 % d’accessibilité sur le web en 2019 à 83 % cette année, soit 182 services. Une petite révolution qui présente un grand nombre d’intérêts. Évidemment, ce travail a été prépondérant pour permettre à la Province de fonctionner efficacement durant la crise sanitaire. Malgré la fermeture physique des bureaux et directions de la province Sud durant les confinements, les administrés ont pu compter sur les agents de la Province qui ont continué d’assurer leurs missions pour traiter les demandes. Plusieurs formulaires ont été mis en ligne, notamment pour la gestion de l’accueil des enfants de publics prioritaires ou encore pour les demandes d’aides aux entreprises, ont été créés et déjà une centaine de démarches étaient accessibles en ligne. Le travail s’est poursuivi depuis et cette transition a permis d’améliorer la relation avec les usagers. « En dématérialisant, nous répondons à une partie de la population connectée, à l’aise avec le numérique, et qui préfère mener ses démarches de façon autonome, sans se soucier des horaires d’ouverture et d’affluence des points d’accueil administratifs », indique Catherine Benito, directrice adjointe de la direction du Système d’Information et du numérique (DSIN). « Et cela semble peut-être paradoxal, mais dématérialiser permet d’apporter un service de plus grande proximité et de meilleure qualité à l’usager. En développant le numérique, nous avons libéré du temps aux agents administratifs sur des tâches chronophages. Ce temps est réutilisé pour accompagner les usagers qui en ont le plus besoin dans leurs démarches administratives. ».

« Nous avons libéré du temps à nos agents pour qu’ils puissent apporter de l’aide à ceux qui en ont plus besoin. »

Le développement d’Espaces Publics Numériques (sites équipés informatiquement – voir pages 10 et 11) et la formation d’accompagnateurs numériques présents physiquement ont été nécessaires. Les usagers en marge du numérique peuvent à présent prendre rendez-vous avec un agent puis se présenter avec leurs documents pour réaliser toutes leurs démarches ensemble. Ces services peuvent être assurés de façon ponctuelle, comme lors des inscriptions scolaires et demandes de bourses scolaires, mais également de façon plus régulière. Une trentaine d’agents mènent des missions d’accompagnement numérique pour effectuer des démarches comme l’Aide médicale, le minimum vieillesse et tous les autres dispositifs sociaux. L’objectif est au final double : poursuivre le développement numérique de la Province sans laisser qui que ce soit au bord de la route. La formule semble efficace : le site www.province-sud.nc, qui permet aux usagers de créer un compte provincial pour notamment y suivre l’état d’avancement de leurs demandes faites en ligne et communiquer avec les services instructeurs, a été repensé et connu une refonte en 2020. Cette année, plus de 100 000 utilisateurs actifs ont été dénombrés.


Un outil efficace pour répondre aux urgences économiques

Au début de la crise sanitaire en Nouvelle-Calédonie, plus d’une centaine de démarches administratives étaient déjà en ligne via des formulaires. Et sans forcément le mesurer, la province Sud allait tirer parti de ce travail de dématérialisation entamé. En 2020, les services de la Province ont eu à répondre aux sollicitations de 5 278 entreprises souhaitant bénéficier d’une aide s’inscrivant dans le plan d’urgence de soutien aux entreprises et patentés impactés par les effets de la Covid-19. Ainsi, 4 541 entreprises ont été aidées, avec une aide moyenne de 199 500 francs, soit 906 millions de francs versés pour l’ensemble du dispositif.

Instruction des dossiers accélérée

Au-delà d’éviter les déplacements à des milliers de personnes, la dématérialisation a permis de décupler la vitesse d’instruction des dossiers et d’éviter certaines faillites. Si ces démarches avaient dû être traitées par courrier, il aurait fallu des mois (envoi du courrier, réception, traitement de la demande, retour du courrier…) pour venir en aide aux sociétés. À condition qu’aucune erreur ne soit constatée et qu’aucun document ne manque pour ces demandes d’aides, ce qui aurait encore allongé le temps d’instruction. Les démarches en ligne ont également permis aux demandeurs de s’adresser directement aux agents instructeurs en cas d’erreur ou de document manquant. Cette facilité est devenue la norme. Chacun peut aujourd’hui connaître l’avancement de ses démarches en se connectant sur son compte provincial. De son côté, la province Sud a mis en œuvre un nouveau plan d’urgence en faveur des entreprises et associations implantées en province Sud et affectées économiquement par les effets des interdictions de circulation maritime, de baignade et d’activités subaquatiques et nautiques prises entre le 1er janvier et le 31 décembre 2023.

Tout sur vos élus en un clic
Envie de mieux connaître vos élus, qui sont-ils, d’où viennent-ils, les mandats qu’ils occupent dans et en dehors de l’institution, les moyens alloués ou encore les indemnités perçues pour l’exercice de leur mandat ? Dans un souci de transparence, la collectivité a créé “Transparenceweb”. Une page Internet qui permet de consulter toutes ces informations, mais également de suivre l’agenda des réunions, des assemblées et des travaux menés par les conseillers.


L’intelligence artificielle, au service de l’efficacité provinciale

Lancé le 30 novembre 2022, ChatGPT atteint un million d’utilisateurs en seulement cinq jours. À titre de comparaison, il a fallu 10 mois à Facebook et 2 mois pour Instagram pour atteindre le même niveau. L’intelligence artificielle générative développée par OpenAI affiche actuellement 200 millions d’utilisateurs. Ce bouleversement technologique nous amène à redéfinir notre manière de travailler et par la force des choses nos métiers au sein de l’institution. Ce chamboulement suscite à la fois un engouement mais aussi des questionnements. La Province qui s’est engagée depuis 2020 dans la transition numérique a saisi cette opportunité au vol en faisant de l’IA un outil pour améliorer l’efficacité de ses services aux usagers. Sébastien Gueunier, le directeur du Système d’Information et du Numérique (DSIN) a indiqué : « L’objectif est de démystifier l’IA et de donner des outils pratiques et des perspectives aux agents et de leur dire qu’ils pourront utiliser ChatGPT pour faire telle ou telle tâche. »

 

 ChatGPT arrive à la province Sud

« Nous allons mettre en place des formations pour nos agents, explique Sébastien Gueunier.  Il y a deux niveaux de formation. D’ici la fin de l’année, nous proposerons des e-formations pour permettre aux agents de formuler des prompts1 ChatGPT afin qu’ils puissent réaliser des tâches. Et l’année prochaine, en coopération avec l’IFAP nous souhaiterions organiser des formations pour aller encore plus loin dans l’utilisation de ChatGPT. » Au sujet des possibilités de cet outil, le directeur de la DSIN estime que nous sommes très loin d’imaginer toutes les applications possibles : « Il va falloir qu’on prenne du recul pour savoir sur quoi, on investit en termes de temps et pour quel type de métier, même si je pense que les agents peuvent être amenés à utiliser l’IA dans tous les domaines. » L’utilisation de l’IA se fera via un outil de chat professionnel baptisé « Wookie » qui va intégrer la version payante 4 de ChatGPT beaucoup plus performante que la version gratuite. « À travers Wookie, les agents pourront utiliser l’IA et discuter avec ChatGPT comme ils discuteraient avec d’autres agents. Ces échanges effectués dans un cadre ‘’privé’’ garantiront la protection des données. » L’un des intervenants Sylver Shorgen, gérant de l’entreprise SF2I anticipe déjà le changement : « On peut très bien imaginer envoyer à l’IA des photos de routes abîmées et lui demander de nous proposer des travaux à entreprendre en fonction des problèmes qu’elle aura détectés ».

 

Pourquoi utiliser l’IA au sein de l’institution ?

Intégrer un tel outil au sein de la collectivité permet de résoudre « un certain nombre de problématiques, comme des tâches sans valeur ajoutée mais incompressibles et chronophages », explique Ida Carapelle gérante et fondatrice de l’entreprise ROI (Return on investment). Cependant, l’IA qui n’a pas de conscience et ne remplacera pas l’homme. « Il faut toujours garder son esprit critique en tant qu’humain et vérifier les réponses données par l’IA. Celle-ci permet juste d’aller plus vite dans l’analyse », souligne Sylver Shorgen.

(1) Un prompt désigne une instruction ou une question posée à ChatGPT.

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